Une nouvelle étude de l’Université Hébraïque, dirigée par le Dr Milan Patra et les professeurs Ittai Ben-Porath et Yuval Dor, révèle que les cellules bêta pancréatiques humaines vieillissantes, qui produisent de l’insuline, montrent des signes de vieillissement appelés sénescence. Malgré cela, ces cellules continuent de bien fonctionner en gardant des niveaux élevés de gènes importants pour leur rôle, ce qui leur permet de libérer de l’insuline en réponse au glucose et d’aider à réguler le taux de sucre dans le sang. En outre, ces cellules âgées activent des gènes qui peuvent stimuler le système immunitaire, notamment par une activité accrue de la voie de l’interféron.
Cette découverte indique que les cellules bêta vieillissantes pourraient jouer un rôle crucial dans la régulation du système immunitaire et être liées aux réactions auto-immunes observées dans le diabète de type 1, offrant ainsi une nouvelle perspective pour lutter contre cette maladie.
Contexte : Le défi du diabète
Le diabète, caractérisé par une déficience ou une résistance à l’insuline, repose sur le dysfonctionnement des cellules bêta pancréatiques, responsables de la sécrétion d’insuline pour éliminer le glucose du sang. Améliorer ou préserver la fonction de ces cellules est crucial pour développer des traitements contre le diabète. À l’échelle mondiale, environ 463 millions d’adultes, soit environ 1 sur 11, sont confrontés à cette condition, un chiffre qui devrait exploser en raison du vieillissement de la population, de l’urbanisation, des régimes alimentaires pauvres et des modes de vie sédentaires. Les projections indiquent que d’ici 2045, plus de 700 millions de personnes pourraient être affectées, posant des défis énormes aux systèmes de santé, aux économies et aux efforts de santé publique. Une action urgente est impérative pour endiguer cette vague, nécessitant des stratégies de prévention efficaces, un meilleur accès aux soins et des traitements innovants.
Principales découvertes : Fonctionnalité et réponse immunitaire
L’étude, publiée dans Nucleic Acids Research, démontre qu’une partie significative des cellules bêta pancréatiques adultes humaines activent un gène appelé p16, indiquant qu’elles sont dans un état de sénescence cellulaire. Fait intéressant, ces cellules sénescentes, plutôt que de montrer des signes de dysfonctionnement, montrent des niveaux élevés de gènes importants pour leur fonction. Ainsi, ces cellules semblent posséder un niveau de fonctionnalité et de maturité supérieur à celui de leurs voisines non sénescentes. Assez surprenant, car les cellules sénescentes identifiées précédemment dans d’autres tissus sont généralement considérées comme dysfonctionnelles et ayant des effets nocifs.
En analysant l’organisation génétique des cellules bêta sénescentes, les chercheurs ont découvert qu’elles modifient l’emballage des gènes – la chromatine, générant une organisation reprogrammée qui permet l’activation de la fonctionnalité. En raison de cela, il semble que les cellules bêta vieillissantes ont la capacité de libérer de l’insuline en réponse au glucose en quantités encore plus importantes, ce qui aide à réguler efficacement les niveaux de sucre dans le sang.
Cette étude a également révélé que les cellules bêta sénescentes ont des niveaux élevés de gènes qui communiquent avec le système immunitaire. Cette réponse, appelée « réponse à l’interféron », agit normalement pour signaler une infection virale aux cellules immunitaires, recrutant leur attaque. Cependant, les cellules bêta sénescentes activent cette voie en l’absence d’une telle infection : ce sont des changements moléculaires dans les cellules elles-mêmes qui simulent cette réponse. La conséquence potentielle est une stimulation accrue des cellules immunitaires pour attaquer les cellules bêta, le processus fondamental qui conduit au diabète de type 1. Cela signifie que les cellules bêta vieillissantes pourraient aider à réguler les réponses immunitaires et pourraient être importantes pour comprendre les réactions auto-immunes dans le diabète de type 1. Potentiellement, bloquer cette réponse, ou le processus de sénescence, pourrait être utilisé pour prévenir la progression du diabète de type 1 à ses premiers stades.
Implications pour le traitement du diabète
La découverte que les cellules bêta pancréatiques vieillissantes peuvent conserver une haute fonctionnalité et répondre aux signaux immunitaires remet en question la vue traditionnelle selon laquelle les cellules sénescentes sont purement nuisibles. Cette nouvelle compréhension ouvre la porte à des thérapies potentielles visant à préserver ou à améliorer la fonction de sécrétion d’insuline des cellules bêta chez les patients diabétiques.
« Ces découvertes sont cruciales car elles suggèrent que les cellules bêta sénescentes ne sont pas un handicap, mais peuvent agir, de manière prédéfinie, pour améliorer la production d’insuline à mesure que nous vieillissons, contrant d’autres effets nuisibles », a déclaré le professeur Ittai Ben Porath. « De plus, s’il est établi que la sénescence des cellules bêta est une caractéristique prédominante des premiers stades du diabète de type 1, le ciblage de ces cellules par un traitement médicamenteux pourrait représenter une nouvelle approche pour prévenir l’attaque auto-immune des cellules bêta. »
Directions futures de la recherche
Les projets de recherche futurs se concentreront sur l’exploration approfondie des mécanismes qui augmentent l’activité des programmes de maturation fonctionnelle dans les cellules bêta vieillissantes, influencés par la dynamique de la chromatine. Une compréhension complète de ces processus promet de développer des thérapies ciblées visant à améliorer la fonctionnalité et la longévité des cellules bêta, ce qui améliorerait la qualité de vie des personnes atteintes de diabète. De plus, comprendre comment le processus de sénescence affecte l’interaction entre les cellules immunitaires et les cellules bêta, et si cela est réellement lié au diabète, pourrait ouvrir la voie à de nouvelles approches thérapeutiques.